La DIES en suspens ?
S'exprimant le 16 Septembre devant le "Conseil National de Lutte contre l'Exclusion", le Premier Ministre a annoncé la prochaine transformation de la DIES en "Délégation Interministérielle à l'Innovation et à l'Expérimentation Sociales". Un de mes contacts au ministère des Sports me confirmait la nouvelle jeudi dernier 22 Septembre ; mais tout n'est encore qu'officieux, comme d'ailleurs la création d'une Direction de la Vie Associative, dont on parle pourtant depuis de longs mois. Mon collègue ne semblait d'ailleurs pas trop mécontent : "Au moins, nous voici débarrassés de cette DIES qu'on ne savait pas comment situer".
La disparition programmée des mots "Economie Sociale" du paysage administratif français, survenant quelques années après semblable mésaventure à Bruxelles, a provoqué un certain émoi dans les milieux concernés. On le comprend d'autant mieux que la création de la DIES en fin 1981 avait été, au fil des ans, progressivement élevée au rang d'événement historique irréversible, de seconde naissance de l'Economie Sociale, promue héritière directe de celle de Charles Gide.
Toucher à la DIES, c'est toucher à un symbole, c'est de l'ordre du blasphème – même si, depuis les origines, l'appellation s'était quelque peu abâtardie, Economie devant faire une place à Innovation, et Sociale une place à Solidaire. Alors, faut-il sonner le tocsin, réclamer coûte que coûte aux pouvoirs publics le maintien, la restauration, d'un sigle aussi chargé en évocations rituelles ?
Sans doute est-ce nécessaire, ne serait-ce que pour la gesticulation. Quand on abandonne une position sans combattre, c'est signe qu'on en abandonnera d'autres ; c'est donc mauvais signe. Battons-nous donc, mobilisons-nous, sauvons l'Economie Sociale des méchantes mains qui veulent l'étouffer !
Mais sachons raison garder. D'abord, parce que la récupération du message par l'actuelle opposition parlementaire ne tardera pas à se faire entendre, et nul ne sait où cela pourrait nous entraîner. Ensuite, parce que cette Délégation ne mérite pas qu'on la pleure. Elle n'a jamais su faire la preuve de son utilité, elle n'a jamais su s'imposer et se faire respecter. Pourtant, ce ne sont pas les soutiens qui lui ont manqué.
Par exemple, créer en son sein un service statistique pérenne et produire de façon régulière des chiffres officiels sur l'Economie Sociale lui aurait donné, non seulement une raison d'être et de servir, mais aussi les moyens d'assurer sa pérennité et sa visibilité. Nous le disons depuis le début. Nous n'avons pas été entendus ; tant pis pour la Délégation !
Ce n'est pas la première fois qu'un ludion administratif s'égare au gré des caprices de la vie politique. Pour l'Economie Sociale, la Délégation était plus un boulet à traîner qu'un instrument efficace d'entrée dans le monde politique. Mieux vaut l'achever que de la laisser survivre et poursuivre ses errances stériles sous d'autres avatars.
On ne détruit que ce qu'on remplace ; ne regardons pas vers le passé, ne l'enjolivons pas. La voie est libre !